Les orthophonistes ont sollicité les nouveaux élus des élections législatives, se rappelant à leur bon souvenir…
Leurs études devraient être reconnues à Bac + 5. Mais aujourd’hui, les diplômes d’orthophonistes ne sont reconnus qu’à Bac + 3. Une “largesse” de l’ex ministre de la santé Marisol Touraine, alors qu’ils n’étaient reconnus qu’à Bac + 2 ! Conséquence : les orthophonistes en milieu hospitalier sont payés au Smic (1.150 € nets mensuels), ce qui n’est guère au regard des études réalisées, et n’attire pas les vocations, naturellement.
“On compte sur Marc Fesneau, sur Jacqueline Gourault aussi qui nous a toujours soutenue. On sollicite aussi les autres députés (Maurice Leroy, Guillaume Peltier, Ndlr) pour leur rappeler que la situation n’a pas évoluée depuis 2013. Tout est à faire !”, s’agace Hélène Sagne, orthophoniste à Chaumont-sur-Loire et présidente du syndicat des orthophonistes de Loir-et-Cher et du syndicat régional. “Éventuellement notre diplôme serait reconnu Bac + 4 en 2019, mais on n’y est pas encore et ça n’est toujours pas le Bac + 5”, ajoute-t-elle.
“Mais vous avez déjà été revalorisées !”
Dans un avenir proche, les GHT (Groupements hospitaliers territoriaux) pourront embaucher des orthophonistes pour faire face à la pénurie. En Loir-et-Cher, un poste sera à pourvoir, doté d’une prime de 3.000 € pour 3 ans. Pas de quoi rassurer Hélène Sagne : “Le problème, ce n’est pas la prime, le problème c’est comment attirer un ou une candidate avec un Smic et un diplôme pas reconnu à sa juste valeur. Dans le département, il y a 10 postes vacants”. En plus d’un concours difficile – qui freine déjà les envies – les candidats en passent plusieurs dans différentes villes, afin d’augmenter leurs chances de décrocher le précieux sésame. Peu d’hommes se présentent, au niveau national 97 % des praticiens sont des femmes, signe d’une profession mal reconnue, et mal payée… En outre, un décret est en discussion actuellement à l’échelon européen, pour baisser le niveau de langue requis pour des orthophonistes étrangers qui seraient susceptibles de venir exercer en France. Un décret contre lequel les orthophonistes françaises sont vent debout : “Il faut évidemment très bien maîtriser la langue française pour être orthophoniste, c’est la base”, s’indigne H. Sagne. Avec une consœur du CMPP (Centre medico psycho pédagogique) elles avaient interpellé le Président François Hollande à Chambord lors de sa visite inaugurale des jardins à la française, le 19 mars dernier. Sans suite. Les orthophonistes d’Indre-et-Loire sont allées plusieurs fois à la rencontre de la candidate Marisol Touraine durant sa campagne législative dans sa circonscription. Elle leur a répondu “qu’elles avaient été revalorisées”, bottant en touche, avant de s’y retrouver elle même le 18 juin au soir… Le combat des orthophonistes continue donc. Hélas, pourrait-on dire.
Face au plafond de 4 % de réussite aux concours français, les étudiants sont chaque année plus nombreux à passer la frontière belge pour intégrer les hautes écoles et universités belges.
Du jour où elle a reçu le feu vert de la Haute Ecole de la ville de Liège (HEL) pour s’inscrire en « logopédie », appellation belge de l’orthophonie, Talitha Puech n’a eu que quelques jours pour plier bagage et dénicher, sans même l’avoir vu, un logement en Wallonie. C’était en 2015.
Aujourd’hui étudiante en deuxième année, elle alterne vingt-trois heures de cours et deux jours de stage, où elle soigne neuf patients en totale autonomie. Un rythme « intensif » qu’elle ne regrette aucunement. Après une première erreur d’orientation et un échec aux concours d’orthophonie en France, « reperdre une année » était inenvisageable. Aux frais d’inscription des épreuves (80 euros par école en moyenne) s’ajoutaient ceux des déplacements, de l’hébergement et d’une très recommandée classe préparatoire, environ 3 000 euros pour six à neuf mois d’entraînement. « Etant boursière, je ne pouvais pas », explique-t-elle.
Limité à 30 % de non-résidents
Face au plafond de 4 % de réussite aux concours français, les étudiants sont chaque année plus nombreux à passer la frontière belge pour intégrer les cursus ouverts des Hautes Ecoles (en trois ans) ou de l’Université (en cinq ans). Une solution si prisée qu’en juin 2006, le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles promulguait un décret limitant à 30 % la proportion de non-résidents. Levée en 2011, la mesure avait fait son retour dès 2013 pour contrer le flux de Français inscrits dans l’intervalle – jusqu’à 80 % de la promotion de l’Institut libre Marie-Haps de Bruxelles en 2012-2013.
Pour les candidats français commence alors le parcours du combattant, se souvient Talitha. Pour participer au tirage au sort des 30 %, il faut d’abord débourser 200 euros pour faire valider son baccalauréat. Puis patienter quatre heures en file d’attente pour espérer poser son dossier lors d’une des trois seules matinées prévues à cet effet. Enfin croiser les doigts et prévoir un plan de secours ! Et le retour en métropole pour celles et ceux qui souhaitent pratiquer en France n’est pas moins compliqué…
Le syndicat régional des orthophonistes du Nord-Pas-de-Calais (SRONP) organise une série de formations gratuites pour les aidants de personnes atteintes d’aphasie, cette pathologie du système nerveux central qui apparaît souvent après un AVC.
Aphasie. A privatif et « phasis », la parole en grec. Littéralement « privé de parole. » Derrière cette pathologie du système nerveux central qui apparaît souvent après un AVC (accident vasculaire cérébral, lire ci-dessous) se cachent des répercussions sur l’autonomie du patient et sur ce que les spécialistes appellent « la dynamique d’inclusion socio-familiale ».
En d’autres termes, c’est tout l’entourage qui est mis à mal, dans la communication avec le patient aphasique, mais aussi dans sa vie quotidienne. D’où l’importance et le besoin, en parallèle de l’intervention orthophonique, de former les aidants, au niveau orthophonique sur le volet communication et au niveau psychologique, pour les aider dans leur vie d’accompagnants.
Quatre formations
Dans ce cadre, le syndicat régional des orthophonistes du Nord-Pas-de-Calais (SRONP) organise des formations gratuites pour les aidants, à Dunkerque. « Nous ciblons le littoral jusqu’à Boulogne, la Flandre et l’Audomarois », souligne Sylvie Mével, orthophoniste à Coudekerque-Branche et présidente du SRONP.
« C’est tout l’entourage qui est mis à mal, dans la communication avec le patient, mais aussi dans sa vie quotidienne. »
Pour le premier volet, une formation « mieux communiquer » animée par une orthophoniste aura lieu le mardi 30 mai, de 9 h 30 à 17 h. Elle sera suivie d’une demi-journée le 16 juin, de 9 h 30 à 12 h 30. Durant la journée du 30 mai, les participants pourront appréhender les différentes façons d’échanger avec une personne aphasique, et comprendre la place de l’aidant et de l’orthophoniste. Le 16 juin sera consacré à la mise en pratique des conseils et à la présentation d’aides concrètes, avec remise de documents.
Le second volet, baptisé « mieux vivre », sera axé sur la psychologie et les répercussions de l’aphasie sur l’aidant. Là encore, deux temps de formation, gratuits, sont proposés : le 30 octobre, de 9 h 30 à 17 h 30, axé sur les notions de stress, d’épuisement, de fardeau, de gestion des émotions, etc. Et le 4 décembre, de 9 h à 12 h 30, pour un échange autour des thèmes de préoccupation des aidants, toujours du point de vue psychologique, et un travail à partir de situations concrètes.
Au départ, souvent, un AVC…
Chez l’adulte, l’accident vasculaire cérébral (AVC) représente la première cause d’invalidité lourde entraînant la dépendance. Chaque année, plus de 130 000 personnes sont victimes d’un AVC et la moitié en garde de graves séquelles. Un AVC entraîne le plus souvent une paralysie d’un côté du corps. Il peut aussi endommager des zones du cerveau responsables du langage dans toutes ses composantes (expression, compréhension, mémorisation, fonctions cognitives…), de l’articulation de la parole, de la vue, de l’audition, de l’équilibre, etc. Parmi ces atteintes du langage, figure l’aphasie. Celle-ci peut aussi être due à des tumeurs du cerveau, à des traumatismes crâniens ou à des maladies dégénératives comme Alzheimer ou Parkinson.
Qu’est ce que l’aphasie ?
L’aphasie est la perte totale ou partielle de la capacité de parler ou de comprendre un message parlé ou écrit. C’est aussi l’impossibilité d’associer une idée avec les mots justes. L’aphasique ne présente pour autant aucune anomalie des organes de la parole (langue et larynx), de la vue et de l’ouïe. L’aphasie n’est donc pas la conséquence d’une surdité ou d’un trouble des organes de la parole. Pour les spécialistes, trouble de la parole et trouble du langage sont différents. L’aphasie réunit les deux, et pose des problèmes tant dans l’expression que dans la compréhension du langage.
Selon l’Inserm, la prématurité touche chaque année entre 50000 et 60000 enfants en France. Nous savons aujourd’hui que ces enfants présentent des risques accrus de développer des troubles de l’oralité : en effet, l’alimentation artificielle, et plus généralement l’hospitalisation, peuvent avoir des conséquences non négligeables sur le développement de la sphère oro-faciale de l’enfant, et plus tard sur le développement du langage.
L’orthophoniste peut donc intervenir très précocement en service de néonatalogie afin de stimuler la sphère orale du nouveau-né, et ainsi l’aider à développer les compétences nécessaires à son autonomie alimentaire, indispensable à la fin de son hospitalisation. L’accompagnement des parents est un autre rôle important de la profession. Ceux-ci se retrouvent souvent démunis face à la situation à laquelle ils sont confrontés, les orthophonistes sont donc présents afin de les informer sur les soins et les stimulations prodigués, et de les guider dans les premières interactions avec leur enfant.
La prématurité en quelques mots
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, une naissance est dite prématurée lorsqu’elle survient avant 37 semaines d’aménorrhée. Une naissance à terme se situe normalement entre 37 et 42 semaines d’aménorrhée. La prématurité se divise en trois catégories :
la prématurité extrême (avant 28 semaines)
la grande prématurité (entre 28 et 32 semaines)
la prématurité moyenne ou tardive (entre 32 et 37 semaines)
Dès le début de l’évolution de la maladie de Parkinson, et surtout dès le moindre signe de trouble du langage ou de la déglutition, un bilan orthophonique s’impose. Seule une rééducation par un orthophoniste peut rendre la parole à ces personnes et éviter toute fausse-route, première cause de décès prématuré dans cette population.
Parkinson : être vigilent vis-à-vis des troubles de la déglutition
Après huit à dix ans d’évolution de la maladie, lorsqu’une personne atteinte de la maladie de Parkinson ne peut s’empêcher de baver, évite certains aliments ou mange de plus en plus lentement, il est temps de réagir. Car si les troubles de la déglutition (dysphagie) sont courants, ils sont encore trop rarement pris en charge. Le risque majeur est la fausse route, définie comme un accident dû à l’inhalation dans les voies aériennes, de liquide ou de particules alimentaires normalement destinés à l’œsophage. Avec un risque d’étouffement mais aussi d’infection pulmonaire.
Dr Denis Obert, médecin spécialisé en médecine physique et réadaptation (Centre Zander, Aix les Bains) : « Les personnes atteintes de la maladie de Parkinson ont des difficultés avec certaines textures (crudités) et, de plus, ne vont pas déglutir automatiquement car le cerveau ne reçoit pas l’information que de la nourriture est prête à être déglutie. D’où un travail sur la déglutition volontaire lors de la rééducation, sur la prise de conscience de ce qu’on a en bouche, sur les textures à privilégier mais aussi sur les conditions optimales du repas. En effet, un parkinsonien peut difficilement mener deux actions en simultané. Le risque de fausse route est présent lorsque qu’il mange et parle en même temps ou écoute des conversations, la télévision etc. ».
Rééduquer les troubles de la déglutition
Selon les études, 60 à 80% des parkinsoniens sont atteints de troubles de la déglutition (dysphagie) ; le principal symptôme étant la fausse route. Le médecin devrait systématiquement poser la question et prescrire un bilan orthophonique, sans attendre que ces troubles ne soient installés et, de ce fait, plus difficiles à prendre en charge.
Anne Rittié-Burkhard, orthophoniste (Reims) : « Sur prescription médicale, l’orthophoniste réalisera un bilan afin de définir précisément les troubles de déglutition. Puis un plan de rééducation sera mis en place, avec des exercices portant sur la force musculaire, la rapidité du geste et la tonicité en fonction du problème spécifique (langue, joues etc.). Il existe aussi des techniques indirectes, comme le choix de certaines textures pour faciliter la déglutition (épaissir les liquides, mixer certains aliments difficiles à mâcher), l’éviction de certains aliments jugés à risque (le riz qui se disperse, la salade qui colle ou le poireau dont l’aspect filandreux peut gêner la déglutition) ou encore la mise en place de postures (inclinaison de la tête au moment d’avaler). Nous enseignons aussi des manœuvres pour améliorer la coordination qui est généralement déficitaire. La déglutition supra-glottique par exemple permet de déglutir de manière plus sûre grâce à une décomposition du mouvement en trois étapes (mise en apnée, déglutition puis toux).
Les patients atteints de maladie de Parkinson se plaignent souvent de baver ; ce peut être dû à une augmentation de la sécrétion salivaire (les glandes salivaires sont surexcitées par des mouvements incessants de la langue) ou une diminution de la fréquence de déglutition. Ce bavage est très mal vécu au niveau social ».
Les troubles de la parole ne sont pas une fatalité
La personne affectée par la maladie de Parkinson peut également présenter des difficultés à parler à une intensité vocale adaptée. On parle d’hypophonie. Le patient a l’impression de s’exprimer à un niveau sonore normal mais en réalité, il se situe bien en deçà. En effet, le cerveau est équipé d’une jauge qui évalue le niveau sonore ambiant. Pour se faire entendre, le cerveau saura alors s’il faut élever ou diminuer l’intensité de la voix. Cette boucle de calibrage est déficitaire chez les parkinsoniens. Leur voix s’éteint, parfois inaudible. Il existe aussi une atteinte au niveau des variations mélodiques : la fréquence de leur voix reste identique, d’où un parler monocorde. Leur débit de parole est perturbé avec des accélérations en fin de phrase notamment. Enfin, les muscles impliqués dans la parole peuvent perdre en tonicité (hypotoniques), d’où une articulation floue.
Selon Anne Rittié-Burkhard : « Des protocoles de travail efficaces existent pour améliorer l’intensité de la voix, les variations mélodiques, les changements de rythme et le souffle. Les séances d’orthophonie permettent aussi de travailler les mimiques, l’expressivité du visage. C’est important pour le lien social car les parkinsoniens ont souvent des visages figés ».
Le chant pour rééduquer la voix
Le chant permet de travailler l’ensemble des paramètres de la voix (modulation, intonation, articulation et débit de paroles). Agilité, puissance, vélocité mais aussi rythme et variations d’octaves… les multiples possibilités offertes par le chant en font un outil très intéressant chez les parkinsoniens. Les bénéfices sont certains sur l’intensité de la voix, la gestion du souffle, la compréhension des paroles par l’entourage. Par ailleurs, travailler la voix améliore souvent de façon indirecte les troubles de la déglutition.
Irène Girard, orthophoniste (Centre Zander, Aix les Bains) : « Après un échauffement corporel, un travail sur la respiration et les mimiques faciales, des jeux d’onomatopées (soupirs sonores etc.) et des vocalises, le chant peut débuter. Le rythme peut être aussi marqué par des maracas, afin de travailler en simultané sur la motricité. Une heure par jour d’échauffement et de chant ou de travail sur la voix projetée pendant quatre semaines est l’entraînement intensif initial, à poursuivre très régulièrement au domicile pour ne pas perdre les acquis ».