Les enfants qui souffrent de bégaiement doivent bien souvent suivre une rééducation chez un orthophoniste. Et s’il était possible de prévenir l’apparition de ce trouble du langage en élucidant les variations génétiques en cause ? Telle est la piste suivie par des chercheurs américains.

Il existe un nouvel espoir pour les personnes qui souffrent d’un bégaiement persistant, selon les recherches inédites menées par des scientifiques du Vanderbilt University Medical Center et de la Wayne State University (Etats-Unis). Le bégaiement est un trouble de la fluidité de la parole qui se caractérise par des répétitions ou des prolongations involontaires de parties de mots, accompagnées de blocages de la parole. Ce trouble du langage concerne environ 650 000 personnes, soit 1% de la population en France. Il touche en majorité les garçons, et débute le plus souvent entre l’âge de 2 et 5 ans. Son évolution est généralement favorable mais une rééducation peut être nécessaire.

Dans une étude publiée dans « The American Journal of Human Genetics et Human Genetics and Genomics Advances », les chercheurs ont décrit une « architecture génétique » pour le bégaiement développemental et signalent que des variations génétiques sont associées à la maladie. Un constat qui ouvre la possibilité d’identifier des indications thérapeutiques pour améliorer plus rapidement les résultats pour les personnes concernées. « Il est clair que le bégaiement est polygénique, ce qui signifie qu’il existe plusieurs facteurs génétiques différents qui contribuent et protègent les personnes contre le risque. », explique le Pr Jennifer Below du Vanderbilt University Medical Center.

Plusieurs gènes identifiés, surtout chez les garçons

Avec l’aide de scientifiques du monde entier, les chercheurs ont collecté des échantillons de sang et de salive auprès de plus de 1 800 personnes qui bégaient, dont 250 familles avec trois générations de bégaiement. Mais face à un plus faible nombre de participants qu’espéré, ils ont souhaité aller plus loin qu’un simple recueil de données, en décidant de créer un outil statistique spécifique pour détecter le bégaiement. Il s’agit en effet une condition rarement mentionnée par un code de diagnostic dans le dossier médical, étant donné que les gens ne sont pas hospitalisés pour cette raison. « Nous avons dû trouver de nouvelles façons pour capturer ce code manquant. », ajoute le Pr Jennifer Below.

À partir de cas confirmés de bégaiement, les chercheurs ont construit d’autres codes de diagnostic pour d’autres conditions telles que le trouble d’hyperactivité avec déficit de l’attention (TDAH) et les réactions auto-immunes aux infections qui surviennent avec le bégaiement. Puis ils ont créé un outil d’intelligence artificielle qui utilisait la présence de ces « phénotypes » enregistrés dans le dossier de santé électronique du patient pour prédire ceux qui étaient susceptibles de bégayer, « même en l’absence d’une note directe sur ce sujet dans leur dossier médical. » Il s’avère que leur modèle de prédiction du bégaiement prédisait positivement la présence de ce trouble dans plus de 80 % des cas.

Ce procédé a notamment permis de découvrir la présence d’un gène lié au bégaiement impliqué dans les troubles du spectre autistique, ce qui peut aider à expliquer pourquoi les garçons sont plus susceptibles de bégayer et pourquoi les filles qui bégaient sont plus susceptibles de réussir à arrêter plus vite. Enfin, les chercheurs ont établi des liens génétiques entre le bégaiement et d’autres traits tels que le TDAH, et concluent sur le fait que « cela pourrait ouvrir des voies pour traiter les deux conditions en même temps. » Ces résultats ont leur importance puisqu’un trouble du langage oral, parfois associé à d’autres troubles, peut être à l’origine de difficultés scolaires et perturber le comportement de l’enfant.

 

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