Entraide reconversion professionnelle et concours d'entrée en école d'orthophonie
Bonjour Lilibird,
La préparation au concours pour les adultes en reconversion n'est pas de tout repos, c’est le moins que l’on puisse dire. C'est un choix qui est généralement longuement réfléchi (tergiversé, même) ; on se dit : "ça ne va pas être facile, mais ça devrait le faire quand même...hein ?! » Une once d’inquiétude et d’hésitation subsiste toujours…
Et puis les heures, les semaines s’écoulent ; on finit souvent la journée avec ce sentiment très désagréable « de n’avoir rien fait » dans le sens : pas avancé dans les révisions du concours. L’épuisement laisse alors la place à l’accablement ; il y a tant de choses à assumer auxquelles la plupart des étudiants n’ont jamais été confrontés : courir entre travail, enfants, repas et entretien de la maison, sans parler de la famille ou de la gestion financière, administrative. Je dis bien la plupart, car les parcours sont vraiment riches, singuliers, et je ne tiens surtout pas à généraliser ou dévaloriser quiconque. Les difficultés ne sont pas les mêmes, mais elles sont présentes pour chacun à leur manière.
On regarde d’un œil quasi désabusé les « sessions minimums quotidiennes » fondre comme neige au soleil, les plages de travail sont vite grignotées par les imprévus (ou juste par l’épuisement) ; sans compter la culpabilité, de ne pas être présente autant qu’on le souhaiterait en tant que parent (mais existe-t-il réellement un parent qui ne culpabilise pas pour une raison ou une autre ?!)
La première chose, c’est de souffler, de fermer les yeux et se détendre. Quelques mouvements de nuque et respirations peuvent s’avérer salutaires, et ce, autant de temps et de fois que nécessaire. En cas d’accès de stress ou de panique, faire la pause est indispensable. Le cerveau ne mémorise rien en situation d’émotion incontrôlable.
Durant ce temps, on se rappelle pourquoi nous avons fait ces choix, pour quelles raisons fondamentales, à quel but très important cela répond-il ? Car ce temps écoulé qui nous sépare de nos 20 ans est une véritable force, tant d’un point de vue de la motivation que de la conscience, de la maturité, de l’histoire qui nous a conduits à ce point. Commencer à préparer le concours est déjà l’aboutissement d’un long chemin parcouru à l’intérieur de soi-même, notamment du point de vue de la confiance en soi.
Je vous recommande vivement de vous procurer l’ouvrage Estime de Soi, Confiance en soi de Josiane de Saint Paul qui est mentionné dans la bibliographie. Il n’est pas très long ni indigeste et comprend des exercices pratiques à mettre en application au quotidien. Ce n’est pas toujours facile et il ne faut pas être pressé ; un chapitre après l’autre au fil des semaines.
L’une des difficultés pouvant être rencontrées lorsque l’on travaille à la maison est que les autres ont parfois du mal à bien se rendre compte de ce que l’on traverse, de la quantité de choses à voir, à aborder. Il est important d’en discuter avec eux, de leur montrer même. Sinon, on a vite tendance à être sollicité indirectement pour des petites choses « je vais à la boulangerie, ça ne te dérange pas de jeter un œil aux enfants ? J’en ai pour 15 minutes et ça ne t’empêche pas de travailler, ils jouent tranquillement. » La course à la boulangerie se transforme bien souvent en escapade qui se prolonge, pour une raison ou une autre. Bien entendu, les enfants ne risquent rien, surtout s’ils sont plus grands et autonomes. Mais… une partie de notre cerveau reste en alerte, ne peut se consacrer à 100% dans ce qu’il est en train de faire. Du coup, une partie de l’attention s’en trouve amputée. Il est essentiel de garder à l’esprit que les plages de travail peuvent être « courtes », mais elles demandent en ce cas toute notre concentration, absolument toute, d’où l’importance d’être dans des dispositions mentales propices. Parfois, il est plus avantageux de perdre un peu de temps pour se rendre dans un autre lieu (bibliothèque par exemple) ; cela permet de cadrer des horaires, et les proches ont plus de facilité à concevoir que « c’est comme si nous étions au travail, on est PAS là ! » Pour soi-même, cela donne une première base, ligne de conduite.
Enfin, cela me semble essentiel dans ce cas de ne pas vouloir tout réviser. On part avec des objectifs, plannings, découpages que l’on ne tiendra jamais, inutile de se leurrer. Cibler matières et concours au plus près de nos possibilités familiales et intellectuelles est essentiel. Certaines mamans passent les concours dans un rayon de … x kilomètres, en se mangeant les ongles devant Via Michelin ou le site de la SNCF (coût, temps de trajet) ; oui, car le concours n’est qu’une entrée en matière, il faut bien garder à l’esprit qu’il y a 5 années à parcourir ensuite, mieux vaut ne pas chercher à faire du sprint et trouver petit à petit son rythme d’endurance. Mais ces mamans s’en sortent ! une maman ayant été admise a fait le choix de faire les trajets Nice-Lyon chaque semaine alors que son fils avait moins d’un an à la rentrée de la première année parce qu’elle avait été acceptée à Lyon. Elle a ensuite fait une demande de transfert et a intégré l’école de Nice. Cela n’a pas été évident tous les jours, mais elle continue son petit bonhomme de chemin et peut même à présent amener son fils à la crèche (ce qui la fait arriver un peu en retard en cours !) Il y a même des femmes qui sont enceintes et ont un bébé durant les études ; tout est donc envisageable, mais cela demande une bonne gestion mentale et matérielle, c’est le point de départ fondamental, le reste est presque de l’ordre du détail.
Selon notre parcours de vie et notre situation personnelle, les choix doivent être judicieux. Une fois que tout cela est en place dans notre esprit, il ne reste plus qu’à laisser tranquillement le temps suivre son cours.
« Pour moi c'est la deuxième année que je le passe, donc c'est cette année ou pas ! »
Comment faites-vous pour vivre avec cette idée, avec tout ce que vous assumez, le travail, les enfants une semaine sur deux, etc. ? Comment être sereine le jour des examens si vous jouez dans votre tête le tout pour le tout, en un coup de poker remarquable, avec la vision de tous ces autres étudiants, si jeunes, si beaux, riants, les yeux pleins de paillettes et de détermination ? Je vais reprendre l’adage marocain que j’adapte : « au concours d’entrée en école d’orthophonie, un homme pressé est un homme mort ! » Votre sommeil et votre tête doivent très certainement s’en trouver malmenés ; cette période de préparation se transforme alors rapidement en cauchemar. Ce n’est pas facile, car on a l’impression, par comparaison aux autres « d’avoir perdu beaucoup de temps » ; mais ce n’est pas le cas. Quelle que soit la finalité, vous devez être satisfaite et vous laisser le droit à l’erreur, c’est le meilleur moyen d’accéder à la réussite. Je ne doute pas que votre pensée découle de processus beaucoup plus complexes dont vous êtes la seule à avoir connaissance (personnels, financiers ou autre), mais la réussite ne dépend pas que de vous, il faut donc prendre en considération cette variable dès le départ et penser vos choix en fonction.
Voici une petite image humoristique qui me fait sourire à ce sujet chaque fois que je la vois : https://fr.pinterest.com/pin/55872851601345161/
L’expérience de vie est une force, à chacun d’en tirer parti. Les étudiants en reconversion n’abordent pas les études avec le même regard ; ils savent parfois mieux ce que c’est « la galère, la vraie » ; ils ne râlent pas en cours de psycho que « ça ne sert à rien, on veut pas être psychologues » (bon peut-être qu’ils râlent un peu en cours d’imagerie, parce que c’est vrai que la relaxation des protons des noyaux d’hydrogène en RMN ne passionne pas même les plus chevronnés 
). On ne réfléchit pas pareil, les informations apportées font échos avec des vécus concrets, l’accès à la compréhension est vraiment plus subtile dans de nombreux domaines. En outre, à l’oral cette maturité peut également constituer un atout de taille.
Les cours audio que nous vous mettons à disposition sur la plateforme e-learning sont vraiment une force hors du commun pour les personnes en reconversion. Ils ont d’ailleurs été créés par une ancienne élève e-orthophonie maman en reconversion qui a été admise. Ils permettent d’utiliser tous les temps où l’on ne peut pas être assis à un bureau, mais où l’on n’a pas forcément besoin de notre tête (trajets, travaux ménagers, parc, cuisine, etc.) C’est un fond sur lequel nous ne sommes pas toujours très concentrés, c’est indéniable ; mais la répétition fait, comme une chanson, que l’on se familiarise avec les termes qui nous rebutaient tant ; ils s’en trouvent moins effrayants, puis finissent par devenir familiers. Eux aussi ne demandent qu’à être apprivoisés, et à devenir nos amis ! En plus, ils se connaissent tous, et nous aident à en rencontrer d’autres. Les mots difficiles sont volontairement épalés dans de nombreux cas, certaines notions difficiles sont reprises plusieurs fois de différentes manières, pour permettre le déclic d’une façon ou d’une autre. Le point fondamental est de ne pas chercher à en écouter « beaucoup » pour amasser un maximum de connaissances entre avidité et précipitation ; cela est valable dans toutes les matières et pour tout le monde : ça-ne-fonctionne-pas !
Mieux vaut privilégier une petite quantité, souvent jugée infime, dérisoire (et insuffisante bien entendu !) à des tonnes d’exercices et leçons bâclés la boule au ventre. Les séances peuvent être (très) courtes, mais les plus régulières possible. Un verre de vin par jour sur une semaine est beaucoup moins nocif que 7 verres de vin concentrés le samedi soir. Je pense que l’on peut dire la même chose pour l’ivresse du vocabulaire ou de l’orthographe lexicale !!
Enfin, je terminerai en disant « le meilleur des talents, c’est savoir utiliser celui des autres » ; je mets l’accent sur ce point, car il est important, et révèle peut-être un mode de fonctionnement qui s’étend au-delà de ce forum. Je découvre aujourd’hui votre message ici, alors qu’il vous a été conseillé dans la capsule pédagogique hebdomadaire de prendre contact avec moi en cas de difficulté organisationnelle. Je vous réponds avec plaisir, au mieux de mes possibilités, j’espère que cela vous sera utile, vous apportera peut-être certaines clés, un peu d’espoir, à vous ou à d’autres d’ailleurs ; mais peut-être que vous faire davantage confiance vous aidera à prendre le risque de faire confiance aux personnes qui vous entourent, à vous reposer peut-être un peu plus sur elles, si vous en avez la possibilité même si, selon le passif, c’est parfois difficile à imaginer. Vous n’y arriverez pas seule, mais comme le montrent ce forum ou vos enfants, nous ne sommes jamais vraiment seuls (pour le meilleur et pour le pire !)
Les étudiants en orthophonie (en reconversion notamment) sont très soudés durant les études en orthophonie, cela aide vraiment ; n’hésitez pas à contacter les associations des écoles qui vous intéressent, à prendre contact avec eux, leur parler de votre parcours, demander la possibilité d’avoir les coordonnées d'admis en reconversion ; leur retour d’expérience sera adapté au résultat que vous recherchez, leurs mots et leur bienveillance donnent le courage de continuer quand on est prêts à renoncer, à tout abandonner, parce que l’on y croit plus. C’est une lueur d’espoir précieuse, et on ne peut que les remercier pour cela.
Je terminerai sur un point beaucoup plus pragmatique, mais n’oubliez pas de vous renseigner sur les frais de scolarité ; je crois qu’il y a des changements en cours assez importants (onéreux…) dans certaines écoles entre « formation continue » et « formation initiale ». Cela aidera peut-être dans les choix…
Bonne journée et bon cheminement à vous !
Amélie Mésange
