- mar. nov. 21, 2023 7:51 pm
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Karine, 49 ans, est la toute première patiente à bénéficier d’une greffe de larynx en France. L’intervention complexe a été présentée ce lundi 20 novembre à Lyon par la grande équipe médicale, qui espère pouvoir répéter cette «prouesse» prochainement.
«J’ai souhaité me faire greffer, il y a une dizaine d’années, pour retrouver une vie normale, pouvoir faire des activités avec mes enfants, pouvoir communiquer, être indépendante», écrit Karine, 49 ans. Pour lui rendre la parole, qu’elle avait perdue depuis vingt-trois ans, douze chirurgiens de plusieurs spécialités et une cinquantaine de personnels des Hospices civiles de Lyon se sont relayés pendant vingt-sept heures, les 2 et 3 septembre. Sa greffe de larynx, présentée ce lundi 20 novembre à l’occasion d’une conférence de presse, deux mois après le traitement chirurgical, est une première en France. Au niveau mondial, cette intervention extrêmement complexe est la quatrième référencée.
Dans une vidéo de moins d’une minute consultée par Libération, on assiste à une séance d’orthophonie de Karine. Sa voix est rocailleuse, son timbre est grave. La respiration est bruyante et la prononciation des syllabes est lente. La patiente suit désormais des séances de rééducation des cordes vocales, de la déglutition et de la respiration avec une spécialiste. Deux mois après la greffe de larynx, organe servant à la respiration, la parole et l’alimentation, Karine «va bien», selon le professeur Philippe Céruse. Si son traitement immunosuppresseur a été renforcé à la suite d’un début de rejet, elle a tout de même pu rentrer chez elle le 26 octobre, dans le sud de la France, auprès de ses filles qui n’avaient «jamais entendu sa voix».
L’aboutissement de dix années de travaux
Tout commence en 1996. A tout juste 22 ans, Karine est victime d’un arrêt cardiaque. Après des complications liées à une intubation, Karine respire désormais grâce à une trachéotomie et perd l’usage de la parole. Plus de quinze ans après, l’ancienne aide-soignante se porte volontaire pour une greffe du larynx. Il aura fallu attendre dix années de plus pour que l’opération, décidée seulement quarante-huit heures avant, soit réalisée.
Ce dimanche 3 septembre 2023, «tout s’est parfaitement déroulé, de A à Z !», se réjouit le professeur Philippe Céruse, chef du service ORL et chirurgie cervico-faciale de l’hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon. Sur une photo publiée sur Twitter (renommé X), des sourires se dessinent sur les visages fatigués des médecins. «Tout s’est passé mieux que je n’aurais pu l’imaginer, comme dans une symphonie parfaitement orchestrée», ajoute le chirurgien Céruse. Aux côtés du professeur Lionel Badet, chef du service d’urologie et de chirurgie de transplantation de l’hôpital Edouard-Herriot, il a dirigé les douze médecins de Lyon, Toulouse, Rennes, Paris, Rouen et Nantes. L’équipe vient d’accomplir une prouesse, la toute première greffe de larynx en France.
En tout, l’opération aura duré vingt-sept heures : le prélèvement sur la donneuse a duré près de dix heures, quant à la transplantation sur la patiente receveuse, elle en a pris dix-sept. Quelques jours après, la patiente prononce quelques mots, même s’il faudra attendre une année complète pour s’assurer de la réussite définitive de la transplantation. «Pour l’instant, le résultat n’est pas satisfaisant», affirme le docteur Céruse.
La quatrième greffe de larynx au monde
L’idée de cette opération a germé dans l’esprit du professeur en 2001, trois ans après la première greffe de larynx réussie, en 1998 à Cleveland, sur un homme qui avait perdu ses cordes vocales dans un accident de moto. Dans le communiqué de presse, le professeur Céruse se remémore la rencontre avec le docteur Luis Fernando Tintinago Londono. Celui-ci, qui n’a jamais rien publié sur son opération de greffe, lui montre comment prélever un larynx : «Un jour, un peu par hasard, en 2010, j’assiste à une conférence à laquelle participe un chirurgien colombien. Et là, devant tout le monde, il détaille de manière très précise la chirurgie d’une greffe de larynx !»
Par la suite, le docteur Luis Fernando Tintinago Londono invite le médecin français une semaine à Cali pour tout lui expliquer. «J’y suis allé en 2012. Je l’ai ensuite, à mon tour, invité en France. Il a donné une conférence puis nous avons réalisé ensemble une dissection sur cadavre durant laquelle il m’a montré comment il prélevait le transplant laryngé, l’un des aspects les plus complexes», explique le docteur Céruse. Pendant la décennie suivante, il s’entraîne avec une équipe d’experts, obtient les autorisations, commence à chercher des patients éligibles. En 2019, la patiente est identifiée. Mais le Covid-19 interrompt tout.
La littérature médicale ne recense la deuxième greffe du larynx qu’en 2010, en Californie. La patiente, une femme de 52 ans, avait également reçu une glande thyroïde et une trachée lors de l’opération. Cinq ans après, c’est au tour de médecins polonais d’annoncer avoir greffé en même temps plusieurs organes de la gorge et du cou, dont le larynx.
Source : https://www.liberation.fr/societe/sante ... 5TJLKQZAM/
Pour aller + loin : https://www.chu-lyon.fr/hcl-realisent-l ... -en-france
«J’ai souhaité me faire greffer, il y a une dizaine d’années, pour retrouver une vie normale, pouvoir faire des activités avec mes enfants, pouvoir communiquer, être indépendante», écrit Karine, 49 ans. Pour lui rendre la parole, qu’elle avait perdue depuis vingt-trois ans, douze chirurgiens de plusieurs spécialités et une cinquantaine de personnels des Hospices civiles de Lyon se sont relayés pendant vingt-sept heures, les 2 et 3 septembre. Sa greffe de larynx, présentée ce lundi 20 novembre à l’occasion d’une conférence de presse, deux mois après le traitement chirurgical, est une première en France. Au niveau mondial, cette intervention extrêmement complexe est la quatrième référencée.
Dans une vidéo de moins d’une minute consultée par Libération, on assiste à une séance d’orthophonie de Karine. Sa voix est rocailleuse, son timbre est grave. La respiration est bruyante et la prononciation des syllabes est lente. La patiente suit désormais des séances de rééducation des cordes vocales, de la déglutition et de la respiration avec une spécialiste. Deux mois après la greffe de larynx, organe servant à la respiration, la parole et l’alimentation, Karine «va bien», selon le professeur Philippe Céruse. Si son traitement immunosuppresseur a été renforcé à la suite d’un début de rejet, elle a tout de même pu rentrer chez elle le 26 octobre, dans le sud de la France, auprès de ses filles qui n’avaient «jamais entendu sa voix».
L’aboutissement de dix années de travaux
Tout commence en 1996. A tout juste 22 ans, Karine est victime d’un arrêt cardiaque. Après des complications liées à une intubation, Karine respire désormais grâce à une trachéotomie et perd l’usage de la parole. Plus de quinze ans après, l’ancienne aide-soignante se porte volontaire pour une greffe du larynx. Il aura fallu attendre dix années de plus pour que l’opération, décidée seulement quarante-huit heures avant, soit réalisée.
Ce dimanche 3 septembre 2023, «tout s’est parfaitement déroulé, de A à Z !», se réjouit le professeur Philippe Céruse, chef du service ORL et chirurgie cervico-faciale de l’hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon. Sur une photo publiée sur Twitter (renommé X), des sourires se dessinent sur les visages fatigués des médecins. «Tout s’est passé mieux que je n’aurais pu l’imaginer, comme dans une symphonie parfaitement orchestrée», ajoute le chirurgien Céruse. Aux côtés du professeur Lionel Badet, chef du service d’urologie et de chirurgie de transplantation de l’hôpital Edouard-Herriot, il a dirigé les douze médecins de Lyon, Toulouse, Rennes, Paris, Rouen et Nantes. L’équipe vient d’accomplir une prouesse, la toute première greffe de larynx en France.
En tout, l’opération aura duré vingt-sept heures : le prélèvement sur la donneuse a duré près de dix heures, quant à la transplantation sur la patiente receveuse, elle en a pris dix-sept. Quelques jours après, la patiente prononce quelques mots, même s’il faudra attendre une année complète pour s’assurer de la réussite définitive de la transplantation. «Pour l’instant, le résultat n’est pas satisfaisant», affirme le docteur Céruse.
La quatrième greffe de larynx au monde
L’idée de cette opération a germé dans l’esprit du professeur en 2001, trois ans après la première greffe de larynx réussie, en 1998 à Cleveland, sur un homme qui avait perdu ses cordes vocales dans un accident de moto. Dans le communiqué de presse, le professeur Céruse se remémore la rencontre avec le docteur Luis Fernando Tintinago Londono. Celui-ci, qui n’a jamais rien publié sur son opération de greffe, lui montre comment prélever un larynx : «Un jour, un peu par hasard, en 2010, j’assiste à une conférence à laquelle participe un chirurgien colombien. Et là, devant tout le monde, il détaille de manière très précise la chirurgie d’une greffe de larynx !»
Par la suite, le docteur Luis Fernando Tintinago Londono invite le médecin français une semaine à Cali pour tout lui expliquer. «J’y suis allé en 2012. Je l’ai ensuite, à mon tour, invité en France. Il a donné une conférence puis nous avons réalisé ensemble une dissection sur cadavre durant laquelle il m’a montré comment il prélevait le transplant laryngé, l’un des aspects les plus complexes», explique le docteur Céruse. Pendant la décennie suivante, il s’entraîne avec une équipe d’experts, obtient les autorisations, commence à chercher des patients éligibles. En 2019, la patiente est identifiée. Mais le Covid-19 interrompt tout.
La littérature médicale ne recense la deuxième greffe du larynx qu’en 2010, en Californie. La patiente, une femme de 52 ans, avait également reçu une glande thyroïde et une trachée lors de l’opération. Cinq ans après, c’est au tour de médecins polonais d’annoncer avoir greffé en même temps plusieurs organes de la gorge et du cou, dont le larynx.
Source : https://www.liberation.fr/societe/sante ... 5TJLKQZAM/
Pour aller + loin : https://www.chu-lyon.fr/hcl-realisent-l ... -en-france